AFRODITE DANS L ARCHIPEL DES AVES
en début de matinée, nous quittons Los Roques pour les dernières îles du Venezuela, distantes d’environ 35 miles à l’ouest-nord-ouest : Las Aves, les îles aux oiseaux. La navigation se passe sans histoires, dans un petit air, voiles en ciseaux (ah … si l’on avait un spi …). En début d’après-midi, le premier groupe d’îles, le plus oriental, Las Aves de Barlovento (« au vent »), se profile. Nous traînons la ligne sans succès depuis le départ des Roques, et, à l’approche des îles, un groupe de fous se met en tête de vouloir pêcher notre petit poulpe. Ils plongent dessus, tendant la ligne parfois. Et il y a de plus de plus d’oiseaux, qui s’émulent et piaillent autour du leurre. Nous sommes en pleine manœuvre d’approche avec une passe délicate à négocier, et nous faisons l’erreur de ne pas remonter la ligne à temps. Ce qui devait arriver arrivât : un oiseau finit par s’accrocher à l’hameçon, et nous le traînons derrière le bateau, lui se débattant, et ses congénères, au moins une vingtaine, paillant de plus belle autour de lui. Une fois la passe négociée, je remonte la ligne pour le dégager, mais il est déjà trop tard, il est mort, sans doute de noyade. En plus, il s’était méchamment embroché avec l’hameçon. Désolés oiseau un peu « fou » … Philippe laisse partir le petit cadavre, si léger, à la mer … Tu parles d’un hommage aux îles aux oiseaux …
Juste après l’entrée, la navigation tient du gymkhana entre les patates de corail, qui préviennent heureusement de leur présence par la couleur bleu turquoise plus claire qui tranche avec le reste du lagon. Nous mouillons à l’abri de la mangrove. Sortons l’annexe pour une première visite à terre de notre nouveau domaine. L’accès se fait par une petite trouée dans la mangrove, gardée par une armée de Bernard-l’hermite. Derrière la bande d’arbres, c’est une sorte de lande verdoyante qui conduit aux gros galets roulés par la mer des Caraïbes. Un monument a été improvisé tout près de la mer, appelé pompeusement « monument aux bateaux ». Il réunit les souvenirs du passage des voiliers : nom du bateau, prénoms des navigateurs, année (voire années pour les récidivistes) de passage, sont gravés dans des morceaux de bois, peints sur des pierres, écrits avec des coquillages. On retrouve des noms de bateaux que nous connaissons via Internet et leurs blogs de voyage : Etoile de Lune, Cercamon. Il faudra y laisser notre trace ! Le soir, nous fêtons l’anniversaire de Caroline et les un an de notre départ en voyage … Hé oui, déjà un an que nous vivons cette vie de bohème, sur les mers, à bord de Sahaya !! Que de chemin parcouru, pourtant ça me semble encore très proche.
Le porche d'entrée dans la mangrove
nous changeons de mouillage, quelques centaines de mètres de zigzags entre les cayes pour nous rapprocher de la barrière de corail. Impression de mouiller dans une piscine, tellement le bleu est … bleu ! Nous peignons une pierre, en forme de poisson, au nom de Sahaya pour marquer notre passage sur l’île.
Et le temps passe ainsi, entre mer et soleil, sans brusquerie. Une « journée type » aux Aves commence par le petit-déjeuner pendant lequel Philippe nous passe des émissions de France-Inter podcastées : La tête au carré, Sur les épaules de Darwin, et aussi un cycle de 5 émissions consacrées à Georges Brassens, une de mes idoles. Puis les quatre hommes partent à la chasse, les deux annexes sont à l’ancre, Fanou et moi palmons tranquillement alentours, pour admirer les fonds. Ils ne sont pas tout-à-fait les mêmes qu’à la Blanquilla, ni qu’aux Roques. Fixées au corail, des anémones de forme conique, comme de petits sapins de Noël idéaux, déploient toute la palette des couleurs pastel : rose, orange, jaune, mauve. Des éponges tubulaires dardent vers la surface leurs tubes orangés, des gorgones éventail et arborescentes suivent les mouvements de l’eau. Côté poissons, les chasseurs remontent gorettes, pagres dents de chien, cardinal (« gros yeux »), mérous, sardes, carangues. Et pour le plaisir des yeux, les couleurs des poissons perroquet, des girelles, des anges, qui éclairent les cayes et les tombants. Les poissons développent diverses techniques de défense. Il y a ceux qui leurrent, comme les papillons Kat-Zié, qui ont deux taches noires et rondes de part et d’autre de la queue qui ressemblent à des yeux. Le prédateur s’y dirige, ce qui laisse le temps au poisson de déguerpir … dans l’autre sens. Il y a aussi les embusqués, qui tablent sur leur mimétisme. Ils ne sont pas agressifs, mais gare si on les touche : les poissons-lions, genre de rascasses dont la piqure peut-être mortelle, et les gros diodons planqués dans des trous, de bonnes bouilles avec leurs gros yeux ronds, et presque un sourire gentil (ça y est, me voilà en plein anthropocentrisme …). Il ne vaut mieux pas le titiller : quand il a peur, il se gonfle d’eau (pour ceux qui ont vu « Némo ») et devient une boule hérissée d’épines, chargées de poison violent.
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