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« Lettre ouverte d’une autre vieille dame à Macron publiée le 1er janvier 2019 »
Colette Dutertre, une vieille dame à la retraite, a écrit il y a 9 mois une lettre à Macron qui n’a pas répondu. Cette lettre ouverte est si sincère et tellement bien écrite que la Gazette du Citoyen a décidé de la reproduire ci-dessous :
J’ai honte, Monsieur le Président.
Vous venez d’effectuer à quelques jours d’intervalle deux entretiens télévisés et une intervention devant le Parlement européen pour justifier votre action. Je ne les ai pas écoutés car je ne m’intéresse qu’aux faits et pas aux arguments plus ou moins fallacieux destinés à une tentative de justification. Les extraits me suffisent car on peut constater en fouillant les archives audiovisuelles qu’ils peuvent varier selon les circonstances et le moment. «Je suis de gauche, je ne suis pas de gauche, ou je ne suis ni de gauche ni de droite.» Et que mieux vaut s’en méfier.
Je suis une vieille dame dont vous pourriez être le petit-fils et, si les naïfs peuvent se laisser abuser, vous êtes le premier Président qui a fait naître en moi un sentiment de honte.
Détruire le modèle social français en prétendant que c’est à cause de la dette, pour faire respecter un 3 % de déficit choisi arbitrairement et affirmer qu’on ne peut pas faire autrement est immoral. Il s’agit, vous le savez bien, d’organiser méthodiquement l’enrichissement des 1 % qui se sont partagé, en 2017 déjà, 82 % de l’augmentation des richesses selon Oxfam.
J’ai honte, oui j’ai honte de la France, j’ai honte de voir le Parlement, dans lequel échanges, discussions, amendements devraient avoir la première place dans une démocratie, réduit à l’état de bureau d’enregistrement de vos seules volontés, imposées par ordonnances ou procédures accélérées.
J’ai honte de ne pas voir sauter le verrou de Bercy, afin que les malfrats qui font évader leurs capitaux puissent être poursuivis correctement.
J’ai honte de voir supprimer l’impôt sur la fortune alors que dans notre pays, selon les dernières statistiques, 5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, en fixant celui-ci à 50 % du revenu médian, c’est à dire 800 €, et 8,9 millions si ce seuil est à 60 %, c’est-à-dire 964 €. De 2005 à 2015, ces nombres ont augmenté de 600 000, dans le premier cas, et d’un million dans le second. Pendant ce temps, en 2017, selon l’Observatoire des inégalités, les 1 % des Français les plus riches touchaient bien plus que dans la majorité des pays européens et s’accaparaient en pourcentage plus que les Anglais ou les Allemands.
J’ai honte de constater que vous préférez diminuer les aides au logement, parlez de supprimer les HLM, et ponctionnez les pensions des retraités lesquels, après une vie de labeur, pourraient espérer finir leur vie paisiblement.
J’ai honte de la destruction des services publics, écoles publiques, hôpitaux, SNCF, sous prétexte d’ouverture à la concurrence, censée améliorer leur fonctionnement alors que le contraire est une évidence dans les pays qui l’ont déjà fait ou dans les services qui, comme la Poste, l’ont été chez nous.
J’ai honte de la privatisation des barrages hydro-électriques, qui ne permettra plus la régulation de la distribution mais fera certainement faire un bond au prix du kilowatt, comme ce fut le cas, par exemple, pour le prix des autoroutes.
J’ai honte de voir la Sécurité sociale, cette magnifique œuvre de solidarité mise à mal pour le seul intérêt des compagnies d’assurance privées, au détriment là encore des plus démunis.
J’ai honte de voir détruire la protection des salariés en détricotant le Code du travail, pour la plus grande satisfaction du Medef, pour lequel l’humain doit être taillable et corvéable à merci, selon la formule moyenâgeuse, et comme au temps des maîtres de forges.
J’ai honte du contrôle renforcé des chômeurs, alors que le nombre d’emplois à satisfaire est très inférieur au nombre de ceux-ci.
J’ai honte de voir nos étudiants tabassés par des nervis d’extrême droite qui agissent au grand jour au sein même de l’université, comme dans les années 30 en Italie ou en Allemagne.
J’ai honte de votre déclaration devant les évêques de France, qui privilégie vos propres convictions en piétinant la loi de 1905 et la laïcité, valeur constitutionnelle et ferment de la paix civile, comme l’avait fait avant vous le maréchal Pétain, en oubliant avec mépris qu’aujourd’hui plus de la moitié des Français se déclare sans religion, et c’est bien là sans doute ce qui vous ennuie. La France n’est plus une monarchie de droit divin.
J’ai honte de la limite à la liberté d’informer. Museler la presse ou les lanceurs d’alerte n’est pas la marque d’une démocratie mais rappelle la triste période de notre histoire de négation de la République.
J’ai honte de votre connivence avec le CRIF, soutien inconditionnel d’un État qui emprisonne et tue en toute impunité et sans raison, au mépris des résolutions de l’ONU.
J’ai honte des restrictions apportées à l’accueil des migrants chassés bien souvent de leur pays par les interventions militaires ou les appétits économiques insatiables des grandes puissances.
J’ai honte de la destruction imbécile et infâme, sans véritable concertation, des projets notamment agricoles mis sur pied à Notre-Dame des Landes.
J’ai honte des bombardements de la Syrie pour faire plaisir aux USA et à la Grande-Bretagne, décidés par le bon vouloir de dirigeants en mal de considération, alors qu’un grand journaliste, prix Pulitzer, qui a enquêté sur place, affirme que personne n’a constaté l’utilisation d’armes chimiques.
J’ai honte enfin du chantage qui nous est fait en permanence et qui consiste à brandir le problème de la dette à réduire chaque fois qu’il s’agit de détruire les acquis des plus modestes, mais à l’escamoter lorsqu’il s’agit de réprimer ou de bombarder, en dilapidant en quelques instants des sommes exorbitantes qui pourraient être consacrées aux plus démunis de nos concitoyens.
Vous voulez être respecté, Monsieur le Président, soyez respectable. On n’insulte pas impunément le peuple qui vous a permis, parfois contre son désir, d’occuper la plus haute charge de la République, ce que vous n’avez cessé de faire depuis votre accession au pouvoir. Les gens qui ne sont rien, les fainéants, les cyniques et ceux qui foutent le bordel au lieu de chercher du travail en ont assez d’être méprisés, insultés, piétinés. La France n’est pas une start-up, c’est un grand pays qui avait une devise magnifique que je vous rappelle : Liberté, Égalité, Fraternité, à laquelle nos anciens avaient cru bon d’ajouter : Laïcité, leur indispensable corollaire. Sous votre férule, cela n’a plus aujourd’hui aucun sens. La France n’est plus qu’une donneuse de leçons rigide, qui piétine allègrement chez elle et ailleurs les droits de l’homme dont elle était l’instigatrice.
Oui, Monsieur le Président, la vieille dame que je suis a honte de ce que devient son pays.
Recevez, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations républicaines et laïques.
Colette Dutertre, le 17 avril 2018.
http://lagazetteducitoyen.over-blog.com/2019/01/lettre-ouverte-d-une-vieille-dame-a-macron.html
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