JEAN-LOUIS TRINTIGNANT
Le timide acteur au sourire tantôt ravageur, tantôt carnassier, est mort ce vendredi à 91 ans. Après avoir reçu un César pour “Amour” de Michael Haneke, il s’est surtout consacré au théâtre et à la poésie, souvent seul en scène, sa voix pour seule compagnie.
Le silence et puis sa voix. Qui tinte, se fait clairement entendre, mais sans bruit, comme si elle prolongeait le silence. Cette caresse vibrante, c’est peut-être ce qu’on aimait le plus chez Jean-Louis Trintignant, qui vient de s’éteindre à l’âge de 91 ans. Un séducteur irrésistible, qui a tenu dans ses bras les plus belles actrices du cinéma français (Brigitte Bardot, Catherine Deneuve, Romy Schneider, Anouk Aimée…), tout en étant l’exact opposé du chasseur – malicieux, il se voyait plutôt comme « une victime des femmes ». À l’écran, le timide audacieux pouvait déconcerter. Était-ce un amoureux transi ou un tueur ? À sa voix s’ajoutait une autre arme fatale : son sourire. Une rangée de dents éclatantes, qu’il dégainait à point nommé. Signe d’enchantement ou rictus carnassier, c’est selon.
Dans les années 1960 et 1970, il est une star de premier plan. Moins bankable que Delon et Belmondo, et pour cause. Comme ce dernier, Trintignant vient du théâtre, mais lui n’en a pas retenu le panache. Au contraire. Tel Beckett, il a cherché à (se) soustraire, visant le moins d’effets possibles. Intérioriser le jeu, c’était son style. Né en 1930 dans une famille bourgeoise de Pont-Saint-Esprit, dans cette région du Gard à laquelle il est resté attaché toute sa vie, le jeune Jean-Louis a grandi auprès d’un père responsable, cumulant les garanties de moralité – industriel, résistant et maire (SFIO) –, et d’une mère nettement plus fantasque, qui aurait rêvé d’être tragédienne. Et à qui l’on doit cette étrange toquade : elle habille Jean-Louis en fille jusqu’à ses… 7 ans. Il aurait pu lui en tenir rigueur, mais non. « Ça ne me rendait pas malheureux, dira-t-il plus tard. J’ai vécu la condition d’une femme. »
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