RÉCIT DU CATAMARAN PIMENT ROUGE

Depuis 2020 de plus en plus de voiliers rencontrent des orques à l'approche de Gibraltar côté Océan Atlantique (une vingtaine en mai 2023). 
On parle "d'interaction" indirecte s'il n'y a pas de contact ou directe s'il y a contact.
Le catamaran Piment Rouge, un outremer 51, navigue depuis les Açores pour rejoindre la Mer Méditerranée. À l'approche de Gibraltar, nous vérifions les dernières informations concernant les interactions avec les orques sur le site GT Orca Atlantica (www.orcaiberica.org) et les réseaux sociaux. Nous passons aussi en revue les derniers conseils de sécurité (décrites sur GTOA  et rappelée dans multicoques mag #218 avril/mai 2023) : 
. arrêter le bateau (voile et moteur)
. éteindre le pilote automatique et le sondeur et 
. laisser la barre lâche.

Dans la nuit du 02 au 03 juin 2023, nous croisons un premier groupe d'orques que nous détectons au son au crépuscule (20h45 TU ; 36°08'N/06°57'W). 
Ils tournent autour de nous
5 minutes et s'en vont, nous laissant soulagés. 
La nuit se passe sans nouvelle rencontre. À l'aube (04h30 TU 36°02'N/06°13'W), un choc surprise à rompu la drosse reliant la barre à roue au safran. Un groupe d'orques est regroupés à l'arrière du bateau. Nous appliquons les consignes de sécurité et appelons le MRCC sur le canal 16. Nous voici à l'arrêt. 
Les orques s'acharnent sur les skegs (quillons de protection des hélices). Au premier skeg arraché, un orque joue à l'écart avec, puis un deuxième s'en va jouer avec le second à l'écart aussi. 
Deux autres orques cherchent aussi des parties à arracher. Au bout d'une quinzaine de minutes, un orque beaucoup plus gros, que nous n'avions pas remarqué, passe à une cinquantaine de mètres et le groupe se disperse. Suite aux témoignages que nous avions lus, nous attendons quelques minutes avant de  remettre les moteurs et tester les safrans à la barre franche. 
Le MRCC toujours toujours en liaison radio nous encourage à nous dérouter vers Barbate et nous indique l'envoi d'un bateau d'escorte qui arrive à notre rencontre dans les 30 minutes.
Nous nous dirigeons sur Barbate au pilote automatique avec l'idée d'évaluer les dégats au port au moteur et voile avant. Malgré l'escorte, un orque solitaire (plus gros que ceux du groupe précédent) vient percuter violement le safran de la coque tribord (07h10 TU 36°07'N 06°03'W). Nous réappliquons les consignes et le bateau escorte nous tourne autour. L'orque est insensible à ce dernier. Il se dirige même vers lui avant de revenir vers nos safrans. Au bout d'une dizaine de minute il se met à distance mais son souffle reste visible. Restant manoeuvrant, nous relançons les moteurs et nous reprenons la route vers Barbate sous escorte, un équipier à guetter à chaque bord. 
L'orque ne revient pas.
Nous arrivons finalement à Barbate, bien accueilli et évaluons les dégats : la drosse rompue, les 2 skegs arrachés, un safran tordu et un safran voilé.

Comparé aux derniers témoignages, nous avons été relativement chanceux concernant les temps d'interaction et les dégats.
Merci au MRCC de Barbate et le SALVAMAR ENIF pour leur réactivité rassurante.
Bravo aux différents médias qui diffusent les consignes de sécurité. Lors de notre appel au MRCC, ils nous indiquaient que les dernières directives nous encourageant à poursuivre la route. Nos trois rencontres ont été très différentes en nombre, taille et impact, nous comprenons la difficulté de consensus scientifiques ou de protocoles d'action.
Notre sentiment après cette expérience est que dans le cadre du "jeu", il semblerait que de s'arrêter est peut être moins excitant pour les orques. les groupes composés d'orques moins gros (juvéniles) sont moins violents et ils se désintéressent du bateau en se concentrant sur les morceaux arrachés. Peut être que des "faux safrans sacrificiels" pourraient les satisfaire et réduire les risques matériels ? 
Par ailleurs, les locaux conseillent de longer les côtes avec une profondeur en dessous de 20 m.
Enfin, nous n'avons pas ressenti d'agressivité avec le groupe et si les coups du plus gros étaient impressionnants, à aucun moment nous ne nous sommes sentis physiquement en danger. 
Relire les consignes avant de rentrer dans la zone nous paraît important pour être prêt, puis s'attendre à un sentiment d'impuissance. Le risque le plus important semble la voie d'eau en cas d'arrachage du safran, d'où l'importance d'appeler les secours le plus rapidement possible après le début de l'interaction et de rester calme.



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